Woofing au Harappa Cafe
Écrit le February 20th, 2025 by Charles Coupal-Jetté
Table des matières
- Liens vers l’album ICloud
- Le Harrapa Café … ça mange quoi en hiver ?
- Mes journées au café
- Alors, c’est le paradis sur Terre ?
- La suite
Liens vers l’album ICloud
Si vous voulez consulter mes photos / vidéos pris durant cette partie du voyage, voici le lien vers l’album.
Le Harrapa Café … ça mange quoi en hiver ?
Yufuin, paradis thermal
D’abord, situons-nous géographiquement. Yufuin est une petite ville touristique réputée pour ses bains thermaux (onsen, en japonais), située dans les montagnes au nord-est de l’île de Kyushu. Les touristes qui fréquentent cette ville sont en grande majorité Coréens et Japonais, et il y a bien moins d’Occidentaux que sur la Golden Route entre Kyoto et Tokyo. Imaginez un mountain town américain ou canadien (comme Sutton!), mais remplacez le ski comme attraction principale par une myriade d’auberges traditionelles japonaises et de sources thermales. Les quelques artères principales de la ville sont bourrées de boutiques qui vous vendront autant des desserts fins que de l’artisant ou des babioles attrappe-touriste. On y retrouve un beau mélange d’habitants locaux de longue date, plus ou moins incommodés par la quantité de touristes, plusieurs gens de l’extérieur venus travailler dans l’industrie touristique, et bien entendu des tonnes de touristes. Si vous voulez un topo touristique plus détaillé de Yufuin, je vais en publier un plus tard cette semaine, ou vous pouvez visiter ce blogue, à qui j’ai emprunté la photo suivante.

Le Harappa Café
Au coeur de l’effervescence touristique, on retrouve tout de même des commerces de tous les jours, fréquentés par la communauté locale … et le Harappa Café, un genre d’hybride entre deux mondes, fréquenté autant par des âmes de passage que des locaux. Le café s’auto-définit comme un slow café communautaire. On y sert 5 jours par semaine un buffet pour dîner, entre 11h30 et 14h00, avec des ingrédients aussi locaux et biologiques que possible. Les clients se servent eux-même, et déboursent selon leur capacité pour ce qu’iels ont mangé. Les employé.es sont toustes des bénévoles qui sont logé.es et nourri.es sur place, en échange de leur travail. Le concept sort un peu de l’ordinaire, mais il est en apparence plutôt simple … sauf quand on observe ce qui s’y trame au quotidien.

Le Harappa Café est en quelque sorte le bébé de Ruyji-san, son gestionnaire pour le moins coloré. À Yufuin, tout le monde semble le connaître, et la porte du café, peut importe les heures d’ouvertures, reste toujours ouverte pour celles et ceux qui le désirent. À toute heure de la journée, on peut y voir des habitués discuter vigoureusement, des woofers lire ou quelqu’un qui cherche ou se trouve le fameux Ruyji. Comme l’explique le site web officiel, c’est un lieux de rassemblement qui a pour mission d’offrir réconfort et à manger à quiconque en aurait besoin. C’est un espace largement en dehors des logiques marchandes. Si vous me connaissez, vous avez probablement deviné que ça me plait beacoup !
Mes journées au café
Le concept
Le café est ouvert tous les jours, sauf mardi et mercredi. La plupart des jours se ressemblent: à 9h, nous entamons la journée avec un nettoyage de la cuisine et du café. Par la suite, tous sont invités à cuisiner ce qu’iels veulent. Oui oui, on cuisine ce qui nous chante! Bien entendu, il faut tenir compte des ingrédients disponibles et abordables. Au Japon, particulièrement en hiver, plusieurs légumes sont chers, et les fruits en particulier. Les pommes, par exemple, sont souvent vendues à environ 2$ l’unité ! Certains classiques, comme les carottes, le choux, les fêves de soja germées, les oignons, et les patates cultivées à Hokkaido, restent cependant abordables. Ruyji a plusieurs amis producteurs dans la région, et il arrive parfois qu’il reçoive des arrivages de légumes locaux (comme des patates douces cette semaine) qui poussent encore à ce moment de l’année.
La routine
D’abord, on nettoie la cuisine. après l’avoir utilisé pour souper le soir précédent. Ensuite, généralement, j’évalue quels sont les ingrédients disponibles et j’essaie de cuisiner quelque chose d’inspiration nord-américaine. Tous mes collègues woofers sont japonais.es ou asiatiques … ce qui fait des patates pilées, des grilled cheese ou du chili con carne des plats qui sortent de l’ordinaire. Parfois, j’apprend de mes collègues et je cuisine des plats à saveurs plus locales.

Aux alentours de 11h30, les premiers clients commencent à arriver. C’est rarement la cohue, les clients (okiyakusama) arrivant au compte-goutte, s’attardant et bavardant sans être pressés de manger. Nous ajustons parfois le buffet en fonction des personnes qui nous visitent, en ajoutant plus de plats vegans si nécessaire. Plus d’achalandage ? Ryuji nous fait ses fameux yakisoba en deux minutes, ou encore mieux, des karaage tous frais.

Excluant les journées très occupées, l’équipe de cuisine mange généralement en même temps que les clients. En fait, la distinction entre client et bénévole est assez floue au Harappa Café: plusieurs clients rapportent leurs couverts dans la cuisine, et certains vont même jusqu’à aider avec la plonge! Les bénévoles s’attablent au même endroit, et les échanges sont souvent nombreux. Le sujet de discussion principal: toujours la nourriture! Mais d’ou viens ce plat? Qu’est-ce qu’il y a dans la sauce? Les liens entre notre et les humains que nous nourissons sont palpables. Vers 14h, le buffet ferme, et l’équipe s’occupe de ranger ce ce qu’il reste du buffet. Généralement, il y en aura suffisament pour le souper. Heureusement, parce que c’est impossible de goûter à tout dans le même repas.
Les après-midis et les soirées libres sont assez tranquilles, rythmés par la lecture, les baignades au onsen, les marches au village, les visites de sanctuaires et les leçons Duolingo. Le café, bien que fermé au public, demeure la pierre angulaire des moments libres et on y trouvera toujours quelqu’un d’attablé durant le reste de la journée.
Alors, c’est le paradis sur Terre ?
L’envers de la médaille
Bien sûr, le café n’est pas parfait. En bon projet communautaire et (presque) autogéré, parfois la collaboration est un défi. Le cuisine est petite et il arrive souvent que nous manquions d’espace. Comme chacun.e est libre de cuisiner ce qu’iel veut, parfois nous manquons de coordination; par exemple, il peut souvent manquer d’un ingrédient car tout le monde voudrait l’utiliser. Disons que la qualité du ménage de la cuisine est d’une qualité variable d’un jour à l’autre. Je dirais par contre qu’en tout en partout, le flou artistique est ce qui donne son charme à l’endroit et qui en fait un lieu unique ou il fait bon cuisiner.

Le froid est probablement le plus grand frein aux activités quotidiennes. À Yufuin, en février, la température de jour oscille entre 5 et 10 degrés, et les nuits franchissent le point de congélation. Pas si froid vous me direz ? Pour la majorité de mes camarades, c’est assez froid pour avoir de rester sous les couvertures, vu le climat auquel iels sont habitué.es. D’autant plus que nous dormons dans une maison japonaise traditionelle, ce qui veut dire qu’elle n’est pas isolée ni chauffée. De mon côté, c’est un avantage, car je dors très bien dans le froid. Ça rend par contre la vie dans les espaces communs un peu incofortable, et par le fait-même la socialisation. Heureusement, la salle commune du café est chaleureuse, dans tous les sens du terme! Ceci dit, bien que le rythme doux de Yufuin m’aie permis un repos bien mérité dans les derniers jours, je dois admettre que je commence à avoir envie de sortir, rencontrer et me lancer un peu plus souvent à l’aventure.
Les humain.es
Par soucis de vie privée, je ne donnerai pas d’informations précises sur mes camarades, mais je ne me sentirais pas bien si je ne laissait pas de places aux merveilleu.ses humain.es avec qui j’ai la chance de travailler ici. D’abord, comme je l’ai déjà mentionné, la plupart sont d’origine japonaise, ce qui fait du japonais la langue couramment parlée dans le café. Étant le moins à l’aise dans cette langue de tout le lot, on m’accomode beaucoup en utilisant l’anglais lorsque nécessaire.
Mes collègues ont des profils assez variés: voyageurs en fin de carrière, étudiantes étrangères en vacances, une mère et son fils qui auraient le talent d’ouvrir leur propre restaurant, et j’en passe. Par contre, les différences s’arrêtent là. Tous ces individus ont un coeur d’or, une curiosité culturelle et culinaire, et un sens de la communauté inné. Malgré la barrière de la langue qui me sépare de la majorité d’entre eux, je me sens entouré par des gens inspirants et avec qui je sais que je partage une vision du monde. C’est définitivement ce qui rend mon séjour le plus agréable.
La suite
Il me reste un peu moins d’une semaine ici. Je me sens à la fois nostalgique et prêt pour la suite: la ville universitaire de Beppu! À venir dans le prochain article: mes activités touristiques à Yufuin.